Quand j’explique que je travaille dans une CAE et que je suis rémunérée à hauteur de mon chiffre d’affaires, la question qui revient toujours c’est : « Ah oui, en fait c’est du portage salarial ? » Et bien non !

Ne nous méprenons pas : que ce soit le portage salarial ou la CAE (coopérative d’activité et d’emploi), les deux options offrent des alternatives intéressantes pour celles et ceux qui souhaitent exercer leur activité en tant qu’indépendants, tout en bénéficiant de certains avantages réservés au salariat. Pour autant, ces deux formats présentent aussi des spécificités qui te feront (peut-être) préférer une formule plutôt qu’une autre.

Allez, on débriefe de ça ensemble !

CAE et portage salarial, on reprend les bases

Avant d’aller plus loin, je veux m’assurer que tu aies les bonnes bases.

La Coopérative d’Activité et d’Emploi

La Coopérative d’Activité et d’Emploi (CAE) est une alternative au lancement d’activité classique, qui permet à des travailleurs indépendants de développer leur projet entrepreneurial sans pour autant passer par la case « création d’entreprise ». L’objectif est simple : proposer un cadre coopératif et sécurisé à l’entrepreneur, en lui permettant de tester son activité, sans avoir à créer de forme juridique, ni à gérer la paperasse associée.

Le portage salarial

Le portage salarial est un statut qui permet aux professionnels indépendants, aussi appelés « portés », d’exercer leur activité en tant que prestataires de services. Dans le portage salarial, il existe une relation tripartite entre le professionnel porté, la société de portage et le client. L’entreprise de portage joue le rôle d’intermédiaire administratif et prend en charge les aspects liés à la facturation, au recouvrement des paiements et à la gestion administrative.

Le statut professionnel, comment ça se passe ?

En CAE : l’indépendant devient un « entrepreneur salarié » (ES) avec un statut de salarié et un contrat de travail en CDI. Au démarrage, l’entrepreneur n’est pas obligé de s’engager de suite avec un contrat ES. Il a la possibilité de commencer par un contrat intermédiaire appelé « CAPE » (contrat d’appui au projet d’entreprise) le temps de tester son activité. L’intérêt de ce contrat intermédiaire ? Démarrer son activité tout en gardant son ancien job ou en touchant les indemnités chômage. Au bout de trois ans, l’entrepreneur salarié a la possibilité de devenir associé de la CAE s’il le souhaite.

En portage salarial : l’indépendant devient un « porté ». Il est salarié de la société de portage et signe un contrat de travail en CDI ou en CDD.

Comment s’organise l’activité ?

En CAE : les entrepreneurs travaillent ensemble pour développer leurs activités respectives au sein de la CAE. Chacun développe son activité en toute autonomie, mais tous partagent des valeurs de solidarité, de mutualisation des ressources et de soutien mutuel.

En portage salarial : le porté bénéficie d’une totale autonomie dans son activité, en gérant ses missions et ses clients comme bon lui semble. Il n’a pas de lien de subordination avec l’entreprise de portage ou le client.

Note : dans les deux cas, l’organisation (CAE ou société de portage) n’a pas vocation à fournir du travail au porté ou à l’entreteneur-salarié. Chacun doit prospecter, négocier, conseiller… Toutefois, le partage de ressources et l’aspect collaboratif, propre à chaque entité, est souvent plus présent dans les CAE de part leur caractère collaboratif.

Qui gère la facturation et la gestion administrative ?

En CAE : il n’existe qu’une seule et unique entité juridique. La CAE se charge de la tenue comptable de chaque entrepreneur-salarié pour sa propre marque, ainsi que des démarches sociales et juridiques. 

En portage salarial : là encore, il n’existe qu’une seule entité juridique. La société de portage se charge de la gestion administrative, comptable et fiscale de chaque porté.

Comment fonctionne la rémunération ?

En CAE : l’entrepreneur-salarié est rémunéré selon le chiffre d’affaires qu’il réalise. À ce CA sont déduis : les charges sociales salariales et patronales ; l’impôt sur le revenu prélevé à la source si concerné et des frais de gestion de la coopérative.

En portage salarial : le porté est lui aussi rémunéré à hauteur de son chiffre d’affaires. Comme pour la CAE, des frais de gestion de la société de portage sont déduis du CA, ainsi que les charges patronales et salariales, et l’impôt à la source si concerné.

Selon l’organisation et son fonctionnement, l’entrepreneur-salarié ou le porté peuvent toucher un intéressement et de disposer d’un plan d’épargne salarial.

À combien s’élèvent les prélèvements ?

En CAE : généralement, les CAE prélèvent entre 10 et 15% (cela dépend de la structure) du CA ou de la marge brute HT (différent selon les CAE) des entrepreneurs-salariés pour financer les frais de gestion de la structure. Ces frais de gestion tiennent compte : des frais de gestion et d’infrastructures, des frais de personnel, des services mutualisés proposés aux entrepreneurs-salariés.

Selon la politique de la structure, les pourcentage de prélèvement peut varier ou être plafonné selon le montant du chiffre d’affaires.

En portage salarial : le porté cède lui aussi un pourcentage de son chiffre d’affaire HT à l’entreprise de portage pour les frais de gestion. Ce pourcentage oscille entre 5 et 15% selon les sociétés. Un grand nombre d’entreprises de portage proposent des frais dégressifs en fonction du chiffre d’affaires, en cumulé sur l’année ou depuis l’entrée du porté dans l’entreprise.

Et la protection sociale ?

De part leur statut de salarié, les entrepreneurs-salariés et les portés sont tous affiliés au régime général de la sécurité sociale et cotisent pour l’assurance chômage et la retraite.

Comment sont accompagnés les indépendants ? 

En CAE : dans le cadre d’une CAE, l’entrepreneur-salarié bénéficie nécessairement (c’est une obligation légale pour la CAE) d’un accompagnement individualisé et de la mutualisation des services. Cet accompagnement se matérialise en minimum deux entretiens individuels par an. Selon les structures, cet accompagnement peut aussi inclure des formations, du conseil ou des ateliers pour développer son activité : prospection commerciale, gestion d’activité, administratif, financement… 

En portage salarial : moins répandu que dans les CAE, les sociétés de portage peuvent aussi proposer un accompagnement ou des modules de formation à leurs portés.

On résume…

Que ce soit la CAE ou le portage salarial, chacune de ces formules offrent des solutions intéressantes pour les travailleurs indépendants qui cherchent à concilier liberté entrepreneuriale et sécurité sociale.

Bien que chaque format présente des similitudes quant au statut juridique ou la rémunération du travailleur indépendant, ils diffèrent cependant sur la philosophie même de l’entrepreneuriat et sur la façon d’envisager le développement de son activité. 

En effet, le portage salarial conviendra davantage aux professionnels qui préfèrent travailler de manière autonome, tout en déléguant la gestion administrative à une entreprise spécialisée. De son côté, la CAE est une option plus appropriée pour celles et ceux qui souhaitent s’impliquer dans un modèle entrepreneurial collectif, basé sur des valeurs coopératives et de partage, le tout complété par un programme de formation. On notera que la CAE joue un peu ici le rôle d’incubateur : on teste son activité dans un cadre collectif.

Le choix entre CAE ou portage salarial dépend donc des préférences individuelles de l’entrepreneur, de son projet, de son activité et des besoins spécifiques en matière de gestion administrative.

Crédit photo : Adeolu Eletu